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LE PLUS GRAND TRANSATLANTIQUE DU MONDE Fait naufrage pour sa première traversée ---***---
Londres, 15 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – Une nouvelle sensationnelle, répandue par les premières éditions des feuilles de l’après-midi, mettait aujourd’hui Londres en rumeur : Le Titanic, le paquebot géant de la White Star Line, le plus grand navire qui soit à flot, était en train de sombrer à quelque distance de Terre-Neuve. A bord se trouvaient 2.500 passagers et 1.000 hommes d’équipage. L’émotion fut extrême dans la capitale, et les camelots qui annonçaient la nouvelle virent rapidement disparaître leurs piles de journaux. Les éditions suivantes, que s’arrachaient les lecteurs, contenaient les télégrammes suivants de l’agence Reuter : « New-York, 15 avril. – D’après une dépêche de Montréal, le vapeur Virginian annonce par « sans fil » que le transatlantique Titanic, qui serait entré en collision avec un iceberg, a demandé du secours. Le Virginian se porte à son secours. » Plus tard : Un télégramme du Cap Race dit : « L’opérateur du « sans fil » à bord du Titanic mande que le temps était favorable et clair, et que le transatlantique se trouvait par 41° 46’ de latitude nord, et 50° 14’ de longitude ouest. « Le Virginian se trouvait à minuit à 170 milles à l’ouest du Titanic. On croit qu’il arrivera près de ce vapeur vers dix heures du matin. L’Olympic, qui se trouvait à la même heure par 40° 32’ de latitude nord et 61° 18’ de longitude ouest, et qui est également entré en communication avec le Titanic, se porte aussi au secours du navire en péril. » 3 h. 30 de l’après-midi.
« Le Baltic annonce par « sans fil »qu’il se trouve à 200 milles du Titanic et qu’il se porte en hâte au secours de ce dernier. « Les derniers appels du Titanic ont été reçus à midi 27. L’opérateur du Virginian dit qu’ils avaient alors cessé brusquement. »
3 h. 45 de l’après-midi.
Un télégramme reçu du Cap Race dit : « Dimanche soir, à 10 h. 25, le Titanic à heurté un iceberg. Le navire a demandé qu’on vint immédiatement à son secours. » Un message reçu une demi-heure après ajoutait que le Titanic sombrait par l’avant, et que toutes les femmes se trouvant à bord étaient descendues dans les canots de sauvetage. |
Les passagers transbordés
New-York, 15 avril. – D’après les dernières nouvelles, le vapeur Parisian, de l’Allan Line, faisant le service de Montréal, et le vapeur Carpathia se tiennent à côté du Titanic, dont les passagers ont été transbordés sur le Carpathia. Le Titanic se prépare à faire route vers le port. L’Olympic et le Baltic se rapprochent du Titanic. Un message dit que le Virginian, de L’Allan Line, a jeté une amarre au Titanic et se dispose à le remorquer vers Halifax. Les informations sont rares, en raison de la confusion des lignes télégraphiques.
(Times.)
Un paquebot géant
Londres, 15 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – Le Titanic, qui est entré la nuit dernière en collision avec un iceberg au large du Cap Race (Terre-Neuve), alors qu’il se rendait pour la première fois de Southampton à New-York, est le plus grand navire du monde. Il appartient à la White Star Line, qui semble décidément jouer de malheur avec ses grands vapeurs. Qui ne se rappelle le naufrage, le 25 janvier 1909, du Republic et la collision qui se produisit, le 20 septembre 1911, entre l’Olympic et le croiseur britannique Hawke ? C’est aujourd’hui le tour de la plus grosse unité de cette compagnie : le Titanic, lancé seulement le 31 mai 1911, et dont le déplacement est de 66.000 tonnes. Les dimensions de ce paquebot sont formidables. Il a en effet 288 mètres de long – soit environ 120 mètres de plus qu’un dreadnought – et 28 mètres de large. De l’extrémité de ses cheminées au bas de la quille, il mesure exactement 53 mètres. Le Titanic, dont le lancement fit tant de bruit dans la presse anglaise, est considéré comme le triomphe de l’architecture navale britannique. Il peut emporter 3.500 passagers et hommes d’équipage. 1.500 personnes peuvent y prendre leur repas en même temps. C’est une véritable ville flottante. A bord se trouvent des bains turcs, des salles de jeu, des salons luxueux, et jusqu’à des appartements réservés pour les jeunes mariés qui voyagent durant la « lune de miel ». Les lits des chambres à coucher ont 1 m. 20 de large. Pour 22.000 francs – prix de ces appartements – on peut ainsi s’offrir le luxe d’un voyage sur l’océan, avec toutes les commodités qu’on trouve à bord d’un yacht privé. C’est le navire « dernier cri ». Il est peut-être intéressant pour le lecteur de savoir ce qu’emportait ce géant de la mer à son départ de Southampton, le 10 avril. Voici une liste de ce qui fut embarqué à bord du Titanic. 38.000 kilos de viande fraîche ; 35.000 œufs frais ; 12.500 kilos de volaille ; 40.000 kilos de pommes de terre ; 7.000 litres de lait ; 1.200 litres de crème ; 5.000 kilos de sucre ; 250 barils de farine ; 10.000 kilos de légumes ; 12.000 bouteille d’eau minérale ; 15.000 bouteilles de bière ; 10.000 bouteilles de vin ; 7.000 verres ; 25.000 pièces d’argenterie ; 5.000 couteaux ; 6.000 plats, assiettes, cuitouts, etc. Parmi les 2.500 passagers qu’emportait le Titanic, se trouvaient le publiciste anglais bien connu, M. W. T. Stead ; M. John-Jacob Astor ; le major Butt, aide de camp du président Taft.
(Voir la suite des dépêches en Dernière Heure.) |
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DERNIERE HEURE UN DESASTRE ---**--- Le « Titanic » est perdu ---**--- Nombreuses victimes ---**---
Des dépêches de New-York qui nous parviennent vers 2 h.1/2 du matin font croire que la perte du « Titanic » a amené une catastrophe terrible. Les premières dépêches de New-York, telles que nous les avons publiées en première page, faisaient croire que tous les voyageurs étaient sains et saufs et avaient été transbordés à bord des navires qui, appelés par la T. S. F., du bateau en détresse avaient pu le rejoindre en temps utile. Ces premières nouvelles sont contraires à la vérité. Les bateaux de secours sont arrivés trop tard. Le nombre des victimes est encore inconnu, mais, il s’annonce comme devant être considérable. 2.358 personnes se trouvaient à bord. Jusqu’à présent, deux heures et demie du matin, 675 seulement ont été sauvées.
L’émotion à New-York
NEW-YORK, 15 avril. – Dépêche particulière du “Matin” (via P.Q.). – De bonne heure, ce matin, la nouvelle que le Titanic coulait en plein océan jeta la confusion dan New-York. Les bureaux de la White Star Line furent assiégés par une foule anxieuse. Des scènes semblables se produisirent à Boston. On disait que le navire avait heurté un iceberg et qu’un appel de détresse avait été lancé par lui dans toutes les directions aux autres navires traversant l’Atlantique. Un très long intervalle s’écoula entre l’arrivée de la première dépêche, envoyée à 10 h. 25, la nuit dernière, et celle du second message, reçu à 8 h. 20 ce matin, par Montréal du Virginian, appartenant à l’Allan Line, et qui annonçait que les pompes et les machines du Titanic fonctionnaient, que la mer était calme. Après cela, les communications télégraphiques deviennent difficiles. Le grand nombre de conversations aériennes échangées entre les divers navires qui s’approchent du Titanic jettent la confusion et empêche de recevoir des informations précises. Le Titanic devait repartir samedi pour l’Europe. Déjà six cents cabines de première classe avaient été retenues. On se préparait à fêter avec éclat son arrivée ici.
Catastrophe
NEW-YORK, 15 avril, 8 h. 20 du soir. – La note suivante est communiquée par la White Star Line : Le capitaine Haddock, de l’ »Olympic », envoie un message radiotélégraphique annonçant que le « Titanic » a coulé lundi matin, à 2 h. 20, après que tous les passagers et l’équipage eurent pris place dans les bateaux de secours et eurent été transférés à bord du « Virginian ». Le steamer « Carpathia », ayant à bord plusieurs centaines de passagers du « Titanic », faisait maintenant route vers New-York. (Reuter). |
Nombreuses victimes
NEW-YORK, 15 avril. – L’administration de la White Star admet maintenant qu’il y a un grand nombre de victimes. (Reuter).
Trop tard !
NEW-YORK, 15 avril (8 h. 45 du soir). – Voici la dépêche qu’on reçoit du Cap Race : « Le steamer Olympic annonce que le steamer Carpathia est arrivé au lever du jour à l’endroit où il espérait trouver le Titanic, mais n’y a plus trouvé que des embarcations et des épaves. « Il annonce que le Titanic a sombré à environ 2 h. 20 du matin par 41° 16’ de latitude et 50° 14’ de longitude. ». Le message ajoute : « Toutes les embarcations du « Titanic » ont été retrouvées. Environ 675 personnes (passagers et hommes d’équipage) ont été sauvés. Les passagers saufs sont presque tous des femmes et des enfants. Le « Californian », de la Leyland Line, se livre à des recherches dans le voysinage de l’endroit où s’est produit la catastrophe. Le « Carpathia » revient vers New-York avec les survivants. » (Reuter).
Le nombre exact des passagers
LONDRES, 15 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – J’apprends à l’instant que le nombre exact des personnes (passagers et hommes d’équipage), qui se trouvaient à bord du Titanic était de 2.358 et non de 2.500. En voici la répartition : 350 passagers de première classe, 305 de seconde classe, 800 d’entrepont et 903 hommes d’équipage. Le paquebot emportait également 3.420 sacs de courrier.
L’escale à Cherbourg
CHERBOURG, 15 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – La nouvelle qu’un accident était survenu au Titanic provoqua une indicible émotion dans notre port. Le Titanic avait quitté Southampton mercredi à midi 20. Il faisait, dans la soirée, sa première escale sur notre rade. Malgré la distance, la foule massée sur les quais distinguait les formes du splendide navire dont les contours étaient silhouettés par des cordons de lumière électrique marquant les hublots et les superstructures. Après avoir embarqué 274 passagers, le Titanic quittait Cherbourg à 8 h. 10 du soir. Parmi les principaux passagers embarqués ici, citons ; M. Ismay, directeur de la White Star Line ; le colonel Astor, attaché militaire auprès du président Taft ; M. G. Widener ; Mrs Cardeza ; M. J. Baxter ; Mrs Eve Douglas. Les seuls voyageurs français embarqués à Cherbourg sont au nombre de trois : M. Aubart en première et MM. R. Pernod et N. Malachard en seconde. |
La valeur de la cargaison
LONDRES, 16 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – Le Times donne, ce matin, de nouveaux détails sur la valeur d’une certaine partie de la cargaison qui se trouve à bord du Titanic. Les cales de ce navire contiennent, dit-il, entre autres choses 50.000 tonnes de caoutchouc et une certaine quantité de thé. Elles renferment aussi des diamants et des valeurs représentant une somme considérable. Les bagages des passagers forment également un chiffre imposant. On dit, par exemple, qu’à elle seule, une cassette de bijoux appartenant à une passagère américaine vaut environ trois millions de francs. |
Précédent accident
LONDRES, 15 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – Le Titanic, qui a été, hier et aujourd’hui, à deux doigts de sa perte totale, a bien failli entrer en collision, mercredi dernier, avec un grand transatlantique, le New-York, au moment de son départ pour Southampton. Le navire venait de lever l’ancre au milieu des acclamations enthousiastes des curieux massés sur les quais, lorsqu’un spectacle des plus angoissants fit tressaillir la foule. Les formidables hélices du transatlantique avaient à peine commencé à tourner que la succion causée par leur fonctionnement fit se rompre les sept gros câbles qui tenaient à quelque distance le grand steamer New-York. L’arrière de ce navire ainsi libéré, se trouva attiré, par le remous, vers le Titanic, et la foule, anxieuse, s’attendait à une catastrophe. Le capitaine Smith, commandant le Titanic (et ancien capitaine de l’Olympic), donna aussitôt l’ordre d’arrêter les machines, et c’est grâce à son sang-froid que l’accident fut évité. Les passagers en furent quittes pour quelques moments de profonde émotion. Le Pall Mall Gazette croit savoir qu’à bord du Titanic se trouvent des diamants et des titres pour une valeur de plus de vingt-cinq millions de francs. Le Titanic est assuré à la compagnie du Lloyd pour une somme de vingt-cinq millions de francs, mais sa valeur est en réalité de cinquante millions de francs. |
La route des transatlantiques barrée par les icebergs
LONDRES, 15 avril. – Dépêche particulière du « Matin ». – Des dépêches reçues ce soir de New-York et de Halifax disent que les grands icebergs qui se sont séparés des glaciers des régions arctiques et qui sont entraînés sur la route des paquebots par les courants, ne traversent généralement pas avant l’été la route habituelle des transatlantiques. Il est en tout cas certain qu’une grande banquise a barré toute la semaine dernière la route que suivent les transatlantiques se dirigeant vers l’ouest. Les capitaines de navire qui la signalent estiment qu’elle a environ 115 kilomètres de long sur environ 60 de large. |
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